Heure-le-Romain - Populations Martyres
Exactions, pillages et incendies d'août 1914. Comédiens de troupes locales et figurants font revivre ce qu'ont subi les villageois.
André Pirson: La population y a été retranchée par les Allemands et menacée d'y être brûlée. Pour empêcher cela, le curé François Janssen et le frère du bourgmestre ont désiré parlementer avec un officier. Ils ont été tous les deux sortis de l'église et tués à coups de baïonnette et de fusil !
Francis De Look: On a amené aux gens de la paille pour dormir... et dans le fond de l'église une mitrailleuse... Le matin suivant tout le village brûlait, certains furent tués dans les maisons pillées. Vingt-sept morts à Heure. On a aussi repris des histoires passées aux alentours.
Camille Valoir et Anne-Marie Navette |
André Pirson: A Hermalle il n'y a pas eu d'exactions, mais des menaces. Tandis qu'à Vivegnis, des civils ont péri. La population a été regroupée dans un champ entouré de mitrailleuses. Un Allemand avait été tué au sommet du Thier d'Oupeye et les Allemands disaient que des civils « francs-tireurs » avaient tiré. Un certain Monsieur Michel, un des directeurs de la Fabrique Nationale de Herstal, est intervenu auprès du major pour lui faire comprendre que c'étaient des soldats belges au pied du Thier d'Oupeye qui avaient tiré avant de s'enfuir. Les hommes ont pu retourner dans leur maison, celles qui ne brûlaient pas bien entendu, entourés de deux soldats allemands, pour remettre leurs armes.
Comment s'explique la
barbarie des Allemands à ce moment là ?
André Pirson: Il y a trois choses. On avait mis en tête des soldats allemands que
l'armée belge n'interviendrait pas ou très peu ; par contre
qu'il fallait se méfier des francs-tireurs, donc des civils qui
auraient tiré sur eux, comme en 1870 durant la guerre entre la France
et la Prusse. Cette idée que les francs-tireurs allaient être
embêtants.
La 2e chose, ils ne
s'attendaient pas à la vaillance et à la résistance des troupes
belges. Ça les a beaucoup énervés et fâchés, au point de
donner plus de puissance à leur haine
de la Belgique !
La 3e chose, leur peur
était tellement grande qu'à l'entrée de certains villages, après
avoir été arrêtés à droite et à gauche, ils pénétraient dans
les maisons pour chercher des boissons alcoolisées. Donc ils
buvaient beaucoup. Ils étaient souvent saoûls lors d'exactions. Si
bien que quand ils entendaient un coup de feu, qui pouvait avoir été
tiré par un des leurs, ils entraient en rage ! Et c'est à ce
moment là qu'ils étaient le plus dangereux évidemment!
Quelles sont les traces
qui restent de la guerre 14-18 à Heure-le-Romain ?
André Pirson: Suite à l'intervention du
curé Janssen les Allemands se sont retirés sans mettre leurs menaces à
exécution. Au niveau des bâtiments, on n'en voit plus la trace
parce que les nombreuses maisons incendiées ont été reconstruites.
Le nom des civils tués en août 14 est inscrit sur le Monument aux
Martyres [croisement des rues Janssen et du Vivier]. Parmi
eux, des enfants de cinq et neuf mois. Ce monument sert également
pour 40-45, pour le côté militaire.
Salle comble, parcourue de fortes émotions. |
Vous
apportez vos connaissances historiques au spectacle.
Francis De Look: Pour pouvoir montrer ça
aux gens il a fallu faire un scénario basé sur des récits !
Il fallait un fil ! Ceux qui savent écrire des textes ont
repris nos résumés pour en faire pas une pièce, mais plusieurs
tableaux.
André Pirson: Jean-Michel Charlier, Guy
Lhoest et Geneviève Deghaye, membres de différentes troupes
théâtrales d'Oupeye, ont créé le scénario à partir de notre
documentation.
Noël Valoir (comédien): Je détiens d'une cousine
des procès verbaux, des dépositions d'ancêtres interrogés par la
police après la guerre. Je raconte le récit de mon grand-père Noël
Valoir, blessé, et de son beau-père tué. Je n'ai connu que ma
grand-mère aveugle, mais jusque cinq-six ans. Mes parents n'en
parlaient pas devant moi, ils gardaient secret beaucoup ! A mon
avis c'étaient des laides années pour eux...
Comment transmettre le
devoir de mémoire aux jeunes ?
André Pirson: J'ai créé la Maison du
Souvenir à Hermalle, avec l'aide d'anciens combattants et d'un
ancien échevin. Nous y organisons la dixième exposition. Au
rez-de-chaussée, la bataille de Liège en août 1914 ainsi que les
exactions commises dans nos villages ; et au 1er étage la
bataille des Ardennes, dont nous commémorons le 70e anniversaire.
Francis De Look: Assez bien d'écoles
viennent visiter la Maison du Souvenir, nous avons de très bons
guides. Certains vont dans les classes avec une maquette. Avec les
« Territoires de la Mémoire » il y a un arrangement, ce qui amène des groupes à notre musée.
Francis De Look: J'ai aussi construit
le site « Médecins de la Grande Guerre » avec le docteur Loodts.
Ça a commencé
drôlement... Mon
arrière-arrière grand-père s'était engagé comme volontaire de
guerre à 65 ans et j'avais cherché pour voir si on en parlait. Mes premiers pas alors sur internet!
André Pirson à l'église Saint Remy de Heure-le-Romain |
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